Tu suffoques. Tu trembles. Tu soupires. Tu fulmines. Tu bouillonnes. Et petit à petit… Tu risques de t’éteindre. Pour de bon. Alors, tu espères que, par un joli hasard, l’un ou l’autre humain te regardera d’assez près et avec assez de bienveillance pour comprendre de quel mal tu souffres.
Heureusement, il y en a de plus en plus, des humains éveillés. Conscients de leur essence: la vie. La vie que tu crées. La vie que tu portes. La vie que tu nourris. La base. L’essentiel. Il y en a de plus en plus, des belles âmes…
Mais depuis quand pleures-tu? Entre les ouragans, les tsunamis, les canicules, tu as pourtant dépensé tellement d’énergie à nous communiquer ton mal-être. Auras-tu encore la patience de nous porter longtemps?
Nous, ces ignorants égoïstes qui remplissions en totale inconscience tes poumons de lingettes pour bébés, de canettes fluos, de boulettes d’aluminium, de tampons et de chaussures en plastique. Oui, je préfère parler au passé. C’est naïf. Totalement con. Mais on parle de plus en plus souvent de toi. Ca me donne la foi! Et puis, sinon, c’est moi qui étouffe. Parce que je ne supporte plus que l’on te fasse du mal.
Je ne supporte plus de te faire du mal… Mais je préfère être honnête avec toi: ce n’est pas toujours facile.
J’ai un compost, j’ai acheté un vélo, je mange bio, ma gourde m’accompagne partout, je fais du covoiturage, je mange de la viande tous les 36 du mois, je suis passée au zero waste dans la salle de bain, etc. J’ai déjà l’impression de faire tant, à l’échelle de ma mini vie. Et ça me semble tellement peu à la fois…
Tu es toujours dans un coin de ma tête. J’ai en permanence le sentiment que je pourrais faire mieux. Je m’en veux à chaque fois que je mets le contact de ma mini voiture. Je m’en veux quand je fais appel à Deliveroo. Quand j’allume le chauffage en octobre. Quand je tire la chasse d’eau pour un micro pipi. Quand j’oublie d’éteindre la lumière de ma salle de bain le matin. Quand, pour une fois, je craque pour un joli tapis chez Zara Home. Quand je vais rejoindre des potes à Marseille en avion. Et même quand je pense à mes projets de famille… Tu te rends comptes? Je culpabilise TOUT LE TEMPS. Chaque jour qui passe. Et même à l’idée de créer la vie.
J’ai choisi de gagner ma croute en travaillant de mes mains. J’adore cette valeur inhérente au travail d’artisan: le respect des matériaux que tu fabriques, toi. Je tente de respecter au mieux les pierres et les métaux, ces ressources qui proviennent de ton ventre. Mais est-ce juste? Ai-je le droit de te les prendre? Parfois j’en doute. Et d’autres fois, je me dis que quelque part, la mission que je me suis choisie est aussi de mettre ta magie en lumière. Ce regard m’apaise…
Ce n’est plus tant la fumée de cigarette ou le sida qui rongent ma génération. C’est la culpabilité de te faire mal. De vivre. De vivre comme on nous l’a appris pendant 15, 20, 30 ans. C’est si difficile de changer des habitudes tellement ancrées dans une société, tu sais. Ça colle. C’est tenace. Et puis, encore pire, ça nous confronte à tout le mal que l’on t’a déjà fait… Et ça, ça pique fort!
Comment vivre avec ça?
Je t’avoue que je suis un peu paumée. Une grosse paumée pleine de bonne volonté qui se balade pourtant avec un post-it ”écolo bobo” collé sur le front. Ah oui, il colle bien celui-là. C’est la génération d’avant qui me l’a mis là. Celle qui a vécu sur ton compte. Qui a carburé au coca, aux pailles en plastique, au faux jambon sous-vide et aux perturbateurs endocriniens. Parce que oui, je préfère te prévenir tout de suite, il parait que nos efforts ne servent plus à rien. Que c’est foutu. Pire encore: que c’est un effet de mode. Que c’est snob. SNOB!
Tu sais ce que ma petite grand-mère m’a dit, un jour? ”Mais arrête un peu avec le bio, de mon temps, on ne se posait pas toutes ces questions!”. « C’est normal, mamy… De ton temps, les poulets grandissaient à l’air libre, sans hormones de croissance. Les pommes goûtaient la pomme et contenaient toutes les vitamines dont tu avais besoin… Tu as eu tellement de chance, mamy… »
Ma belle planète, je pleure souvent pour toi, tu sais. Pour nous tous. Parfois parce que je suis triste. Parce qu’on s’est oubliés. On a oublié notre vraie nature. Notre essence d’êtres vivants. Nos origines. Nos racines.
Et parfois aussi, je pleure de joie. Comme hier, devant ce joli film français qui retrace la vie de Jacques-Yves Cousteau. Parce qu’il n’y a rien de plus beau que l’éveil des consciences. Parce que même si on s’est un peu oubliés au nom de cet égo propre à l’humain, c’est tellement joli d’oser ouvrir les yeux et d’agir avec tout son cœur.
Merci à Pierre Rabhi, Élise Lucet, Cyril Dion, Al Gore, Frédéric Lopez et tous ces humains merveilleux qui, au fil de mes lectures et de mes visionnages, m’aident à me reconnecter à ma vraie nature. Ma vraie nature d’être vivant parmi les êtres vivants. Juste ça. Je nous souhaite à tous de retrouver le goût de cette magie-là…
Bise, Lou
No Comments